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Points essentiels à retenir

  • Au cours des prochains mois, il sera déterminant pour la santé de l'économie de savoir dans quelle mesure le récent plongeon des chiffres estimés provenant des études de marché, qui survient généralement pendant une récession, piquera la dépréciation des chiffres réels actuels.
  • Selon nous, le compromis risque-rémunération auquel sont confrontés l'économie et les marchés financiers est en berne, bien qu'un changement favorable dans la politique commerciale ou un regain d'attention de la part de l'administration pour son plan d'action en matière d'offre (déréglementation, réductions d'impôts/soutien fiscal) pourrait entraîner un retournement de situation encourageant.
  • L‘ensemble du tableau de bord demeure dans le vert, bien qu'il soit trop tôt pour que les chiffres reflètent les répercussions de la hausse des droits de douane. Les marges bénéficiaires se sont détériorées pour devenir un ‘signal jaune’ de prudence ce mois-ci.

On dit souvent que si le mois de mars « comment en courroux, il finira tout doux, tout doux ». Cette expression fait référence à la transition entre l'hiver et le printemps, mais elle s'applique peut-être davantage à ce que les marchés boursiers ont vécu en avril cette année. Les actions américaines ont plongé précipitamment au cours de la semaine qui a suivi les annonces du président Trump sur les droits de douane, l'indice S&P 500 ayant décroché de 11 % et l'indice VIX ayant dépassé les 50. Les actions se sont ainsi retrouvées au bord du marché baissier, en chute de 19 % par rapport au pic du 19 février. Toutefois, elles se sont redressées plus tard dans le mois, grâce à des signes de désescalade des droits de douane. Fait remarquable, le S&P 500 n'a perdu « que » 0,8 % sur le mois.

Les chiffres des études de marché révélaient déjà des signes importants de dégradation au cours du premier trimestre 2025, une tendance qui s'est accélérée en avril. Par exemple, l’étude de marché du Conference Board sur la confiance des consommateurs avait déjà chuté de 18,9 points depuis son pic de novembre après l'élection jusqu'en mars, avant que la nouvelle baisse de 7,9 points en avril ne ramène l’indicateur aux niveaux les plus bas de la pandémie de 2020. De telles décélérations ne se produisent généralement qu'en période de récession, ce qui signifie qu’au cours des prochains mois, il sera déterminant pour la santé de l’économie de savoir dans quelle mesure les indicateurs estimés des études de marché encore plus faibles piqueront les chiffres réels actuels du marché (Illustration 1).

On peut toutefois se demander si les chiffres réels suivront en fin de compte les chiffres estimés. Cela s'explique principalement par ce qui s'est passé en 2022, lorsque les chiffres estimés se sont effondrés à la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, de la crise des banques régionales et de l'inflation élevée, alors que les chiffres réels ont largement résisté. Cette période est connue sous le nom de « atmosphère de ralentissement ». Même si de nombreux Américains n'étaient pas très satisfaits de la situation économique, leur vigueur a persisté, portée par la bonne santé du marché du travail, un soutien budgétaire antérieur et des économies résiduelles liées à la pandémie, ce qui a permis à l'économie de progresser.

Illustration 1 : Chiffres réels c. chiffres déprimés

Source(s) : Citi. Note : Indices de changement des chiffres économiques estimés et réels de Citi US. Au 30 avril 2025.

En 2025, la probabilité que la vigueur des consommateurs l'emporte sur les vents contraires liés aux droits de douane semble, selon nous, plus limitée. Même si le marché du travail est encore en bonne santé, avec une création d'emplois mensuelle moyenne de 144 000 jusqu'à présent en 2025, cela fait pâle figure par rapport au marché du travail en pleine effervescence de 2022, où la création d'emplois mensuelle s’élevait en moyenne à 380 000 (et à 603 000 en 2021). Un nouveau ralentissement du marché du travail pourrait s'avérer problématique pour l'économie, étant donné que les revenus du travail représentent la majeure partie du pouvoir d'achat de la plupart des Américains. Il est important de noter que les consommateurs semblent avoir déjà commencé à se replier sur eux-mêmes face aux incertitudes croissantes, comme l'a souligné Scott Boatwright, PDG de Chipotle, lors de sa conférence sur les résultats du premier trimestre de la chaîne de burritos :

« Économiser de l'argent en raison des inquiétudes liées à l'économie est la principale raison pour laquelle les consommateurs réduisent la fréquence de leurs visites aux restaurants. »

Le tableau de bord est encore vert, mais attention aux résonances des années 1970

Au cours des prochains mois, l'attention des investisseurs se portera sur les signes indiquant que les chiffres réels peuvent — ou ne peuvent pas — s'inverser. Notre propre point de départ dans cette démarche sera notre étoile polaire économique, le tableau de bord des risques de récession ClearBridge.

Le mois dernier, nous avons remarqué que le tableau de bord ne reflétait pas encore les répercussions des annonces de droits de douane, à l'instar de ce qui s'est passé au début de la pandémie. Cette dynamique était également présente dans le tableau de bord lors de l'embargo pétrolier des années 1970, une autre période où des chocs exogènes ont finalement conduit à une récession.

En effet, plusieurs éléments de la récession de 1973-75 coïncident avec la conjoncture actuelle. Nous avons décrit cette période plus en détail il y a quelques années, mais en voici un petit récap : une expansion des dépenses budgétaires au milieu des années 1960 — visant à financer la guerre du Viêt Nam et des programmes de protection sociale de la Grande Société — a poussé l’inflation à la hausse. À cela est venue se greffer une politique monétaire peu contraignante, qui a amené les investisseurs étrangers à remettre en question la viabilité de l'étalon-or. Une ruée sur le dollar a été suivie par une vente massive de l'étalon-or, ainsi que par un contrôle des salaires et des prix, et finalement par une crise pétrolière.

Il existe également des différences essentielles entre cette période et aujourd'hui : les États-Unis ne sont plus assujettis à l'étalon-or, le contexte démographique actuel laisse entrevoir un risque d'inflation moindre et le développement de l'industrie américaine du schiste a permis de compenser (économiquement) les répercussions de la hausse des prix du pétrole.

Il est toutefois intéressant de noter que, si les chiffres estimés (nouvelles commandes de l’ISM) et les chiffres réels (ventes au détail, marges bénéficiaires) ont commencé à se dégrader sur le tableau de bord au fur et à mesure que le choc énergétique se produisait au milieu des années 1970, ce sont les chiffres estimés qui se sont repliés en premier, passant au rouge, tandis que les chiffres réels se sont maintenus en territoire jaune, dans un premier temps.

Illustration 2 : Évolution du tableau de bord de la récession de 1973 à 1975

Source(s) : BLS, Réserve fédérale, Census Bureau, ISM, BEA, American Chemistry Council, American Trucking Association, Conference Board et Bloomberg. Le tableau de bord du risque de récession de ClearBridge a été créé en janvier 2016. Les signaux de récession présumés avant janvier 2016 sont fondés sur la façon dont les données sous-jacentes ont influencé les indicateurs composants à l’époque.

Certains éléments de la conjoncture actuelle renvoient à cette période historique. Par exemple, les nouvelles commandes de l'ISM se sont rapidement dégradées au cours des derniers mois à mesure que la guerre commerciale s'intensifiait. Bien qu'il soit trop tôt pour que les indicateurs des chiffres réels révèlent une dépréciation liée au commerce, au moins l'un d'entre eux — les marges bénéficiaires — semble avoir subi des vents contraires avant même le Jour de la Libération. Cet indicateur s'est dégradé pour devenir un signal jaune de prudence ce mois-ci. L‘ensemble du tableau de bord demeure dans la zone verte d'expansion, et il n'y a pas d'autres changements dans le tableau de bord ce mois-ci (Illustration 3).

La dégradation des marges bénéficiaires reflète les événements qui se sont déroulés avant l'escalade de la guerre commerciale. L'inflation, et donc le pouvoir de fixation des prix des entreprises, a diminué plus rapidement que les salaires et d'autres coûts d'intrants clés, ce qui a réduit les bénéfices. Les marges bénéficiaires ont donc baissé par rapport à leurs niveaux record, et le signal est désormais passé dans le jaune. En l'absence de guerre commerciale, cette dynamique serait moins préoccupante. Toutefois, la perspective d'une pression supplémentaire sur les marges dans les mois à venir, en raison de l'augmentation des droits de douane, semble probable. Cette situation est préoccupante, car lorsque les marges se contractent et que les bénéfices s'érodent, les équipes de direction des entreprises sont souvent contraintes de licencier des travailleurs, ce qui déclenche ou amplifie une boucle de rétroaction récessionniste, les consommateurs se repliant sur eux-mêmes en raison de la perte de revenus.

Illustration 3 : Indicateurs des risques de récession aux États-Unis

Source(s) : BLS, Réserve fédérale américaine, Census Bureau, ISM, BEA, American Chemistry Council, American Trucking Association, Conference Board, Bloomberg, CME, FactSet et Macrobond. Chiffres au 30 avril 2025. Le tableau de bord du risque de récession de ClearBridge a été créé en janvier 2016. Les signaux de récession présumés avant janvier 2016 sont fondés sur la façon dont les données sous-jacentes ont influencé les indicateurs composants à l’époque.

Dans ce contexte, nous estimons toujours que les demandes initiales d'allocations de chômage constituent l'indicateur économique le plus important à surveiller — nos signes avant-coureurs — pour déterminer la trajectoire de l'économie. Jusqu'à présent, les demandes ont très bien résisté dans les semaines qui ont suivi le Jour de la Libération, et nous estimons que le bond fin avril est une question d'ajustement saisonnier liée à la date des vacances de printemps à New York, qui est apparue au cours des dernières années, mais qui s'inversera probablement au début du mois de mai. Toutefois, la diminution des marges bénéficiaires signifie qu'il y a moins de marge de manœuvre en cas d'affaiblissement du marché du travail ou de ralentissement de la demande dans les mois à venir.

Cela nous amène à penser que le compromis risque-rémunération auquel sont confrontés l'économie et les marchés financiers est actuellement orienté à la baisse. Un changement favorable dans la politique commerciale ou un regain d'intérêt de la part de l'administration pour son plan d’action en matière d'offre (déréglementation, réductions d'impôts/soutien budgétaire) pourrait rendre ce compromis plus encourageant. Toutefois, une action rapide est probablement nécessaire pour contrecarrer les répercussions (et les effets à retardement) des incertitudes élevées et de la pression sur les marges.

Par conséquent, nous estimons que si les investisseurs choisissent de toujours privilégier les sociétés de qualité supérieure ayant fait leurs preuves en matière de gestion des périodes de turbulences, comme celles dont les dividendes augmentent, ils devraient continuer à en tirer profit. Notamment, les entreprises qui ont été en mesure d'augmenter régulièrement leurs dividendes ont récemment comblé l'un des plus grands écarts de résultats sur 12 mois observés au cours des 30 ernières années par rapport à l'indice S&P 500. Après des périodes similaires de recul des résultats à la fin des années 1990 et au début des années 2020, les entreprises qui augmentent leurs dividendes ont ensuite dépassé le S&P 500 au cours des années suivantes.

Illustration 4 : Progression des actions à dividendes croissants

Source(s) : S&P, NBER, Bloomberg.* Les titres à dividende croissant sont des actions de l’indice S&P 500 qui ont généré trois années (périodes mobiles) consécutives de croissance positive du dividende (dividendes spéciaux compris) sur une base mobile (trimestrielle), évaluées mensuellement et équipondérées. Données au 31 mars 2025.



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