Principales conclusions
- Les prix du marché et la Réserve fédérale (Fed) suggérant fortement que le cycle de hausse des taux est terminé, l'attention se porte désormais sur la date à laquelle les baisses de taux commenceront. Les contrats à terme tablent sur une première réduction en mai 2024, soit une pause de 10 mois qui serait conforme au message faisant état de « taux plus durablement élevés » de la Fed.
- Au-delà d'une réduction modeste des taux pour éviter un resserrement de facto dans un contexte de ralentissement de l'inflation, nous pensons que le catalyseur de réductions plus substantielles permettant d'amener la politique monétaire en territoire accommodant serait la présence de destructions d'emplois, généralement associées à une récession qui s’installe.
- Quelle que soit la date de la première baisse des taux, les pauses de la Fed constituent généralement une période favorable aux actions : l'indice S&P 500 progresse en moyenne de 5,1 %, ce qui laisse à penser que le rebond de Noël pourrait se poursuivre.
La désinflation reprend ses droits
Après deux mois qui ont laissé entrevoir une possible ré-accélération, la dernière série de données sur l'inflation montre une nette reprise de la tendance à la baisse. Par conséquent, un statu quo de la Réserve fédérale est quasiment assuré lors de la réunion du Comité fédéral de l'open market (FOMC) de la semaine prochaine, une hypothèse confirmée par les récents commentaires de plusieurs membres votants, dont le président Powell lui-même. La possibilité de nouvelles hausses de taux avait déjà été envisagée après la publication d'un produit intérieur brut (PIB) exceptionnel au troisième trimestre (révisé à la hausse à 5,2 % la semaine dernière) et le risque d'une baisse de l'inflation moins rapide qu'on ne le pensait.
Il y a six mois, l'indice des prix des dépenses de consommation personnelles (PCE) de base - le baromètre de l'inflation préféré de la Fed - était clairement en baisse, la question étant de savoir quelle serait l'ampleur de cette baisse. Il est possible de tenter de répondre à cette question en analysant et en annualisant les tendances de l'inflation au cours des derniers mois, afin de se faire une idée de l'évolution de l'inflation si le rythme récent se maintenait. En avril, le taux de variation annualisé sur trois mois s'élevait à 4,1 %, tandis que le taux de variation annualisé sur six mois était encore plus élevé (4,5 %), tous deux bien au-dessus de l'objectif de 2 % de la Fed, mais en net recul par rapport aux pics atteints, autour de 6 %. Ces chiffres ont encore baissé au cours de l'été avant de remonter au début de l'automne.
Toutefois, les dernières données d'inflation mensuelles ont été plus modérées, les taux annualisés à trois et six mois de l'indice PCE de base s'établissant respectivement à 2,5 % et 2,6 %. S'il est encore trop tôt pour que la Fed crie victoire, l'inflation est en passe de s'établir bien en deçà de l'objectif fixé pour cette année, ce qui écarte probablement la possibilité de nouvelles hausses.
Maintenant que le cycle de hausse des taux est derrière nous, les investisseurs s'intéressent à la date des premières baisses des taux. Les données historiques offrent un point de départ raisonnable pour établir des hypothèses : la première réduction des taux intervient en moyenne cinq mois seulement après la dernière hausse. La durée de cette période, appelée pause, varie entre un mois dans les années 1980 et 15 mois au milieu et à la fin des années 2000, juste avant la crise financière mondiale (Illustration 1).
Si la dernière hausse de taux de ce cycle a eu lieu en juillet et que la Fed maintient son statu quo la semaine prochaine, la pause sera déjà de cinq mois. Les contrats à terme sur les fonds fédéraux ne prévoient pas de baisse des taux avant la réunion d'avril/mai 2024, ce qui représente une pause de 10 mois, qui se situerait dans le haut de la fourchette historique et serait conforme au message faisant état de « taux plus durablement élevés » de la Fed.
Illustration 1 : Des taux plus durablement élevés (pour combien de temps ?)
Données au 30 novembre 2023. Source : Federal Reserve, Bureau du recensement, Bloomberg.
Chaque cycle est toutefois unique et la durée de la pause dépend des conditions qui prévalent à ce moment-là. Lorsque le dernier cycle de hausse des taux a débuté, la condition à remplir pour une pause était la modération de l'inflation sur une trajectoire crédible vers l’objectif de 2 %. Nous pensons que les critères régissant les baisses de taux sont totalement différents.
Il existe deux types de réductions des taux d’intérêt : celles qui contribuent à rapprocher l'orientation de la politique monétaire de la neutralité (réglage fin) et celles qui l'amènent en territoire accommodant (baisses de taux de récession). La politique monétaire est évaluée en termes réels : le taux des fonds fédéraux moins l'inflation. Cela signifie qu'à mesure que l'inflation se ralentit, la Fed pourrait être amenée à réduire ses taux afin de ne pas resserrer sa politique monétaire par inadvertance. L'ampleur de la réduction nécessaire n'est pas connue, mais en théorie, il existe un point d'équilibre auquel le taux réel des fonds fédéraux ne soutient ni ne freine la croissance économique, connu sous le nom de taux neutre. Pour une discussion plus détaillée sur ces questions et les mécanismes en jeu, veuillez consulter notre blog d’août 2023.
Au-delà d'une réduction modeste des taux pour éviter un resserrement de facto, nous pensons que le catalyseur de réductions plus substantielles serait la présence de destructions d'emplois. Même si le marché du travail montre des signes d'essoufflement, la création d'emplois reste robuste, ce qui laisse penser que les baisses de taux ne sont pas encore à l'ordre du jour. Si une première baisse des taux au deuxième trimestre 2024 ne semble pas déraisonnable, les près de quatre réductions et demie supplémentaires prévues par les contrats à terme sur les fonds fédéraux au cours de la dizaine de mois suivants paraissent agressives. Toutefois, si une récession devait se matérialiser, le FOMC abaisserait probablement les taux plus fortement que ce qui est prévu actuellement.
Quelle que soit la date de la première baisse des taux, les pauses constituent généralement une période favorable aux actions. Par le passé, l'indice S&P 500 s'est redressé de 5,1 % en moyenne pendant les pauses de la Fed, ce qui laisse penser que l'indice peut encore progresser puisqu'il n'a pratiquement pas bougé depuis le dernier relèvement des taux de la Fed, en juillet. Pourtant, le S&P 500 a chuté de 10,3 % entre son pic de juillet et ses plus bas niveaux d'octobre, une période qui a coïncidé avec des craintes accrues de nouvelles hausses de taux et une augmentation des rendements des bons du Trésor à 10 ans, alors que l'inflation et les données économiques se révélaient plus dynamiques que prévu. Les actions ont presque totalement compensé ce repli en novembre, alors que des tendances désinflationnistes plus marquées sont apparues plus clairement, ce qui nous rappelle les mots du blog du mois dernier, à savoir que les données économiques et de marché se déplacent rarement en ligne droite. En l'absence de risques évidents à l'horizon et compte tenu de la solidité des résultats du troisième trimestre, la remontée de Noël pourrait se poursuivre.
Illustration 2 : Le dernier tour de piste
Source : FactSet, Réserve fédérale. S&P.
Nous continuons de penser que le marché et l'économie entreront dans la zone de tous les dangers - la phase la plus délicate de ce cycle - au cours des deux ou trois prochains trimestres, lorsque les effets retardés du resserrement de la Fed se feront sentir et que les marchés de la consommation et de l'emploi, jusqu'à présent sains, passeront d'une situation de tension à une situation de contraction pure et simple. Nous ne sommes donc pas convaincus que le risque de récession soit totalement exclu. Le Tableau de bord sur les risques de récession de ClearBridge va dans le même sens, avec une absence de variation des signaux le mois dernier. Bien que plusieurs indicateurs se soient légèrement améliorés, les progrès n'ont pas été suffisants pour entraîner des changements ou éloigner notre scénario de base d'une récession économique en 2024.
Illustration 3 : Tableau de bord sur les risques de récession de ClearBridge

Source : ClearBridge Investments.
Même si la récente série de données nous amène à envisager un atterrissage en douceur avec davantage de sérénité, nous restons conscients qu'un cycle de réduction substantiel (75 points de base ou plus) a toujours contribué par le passé à modifier la tendance économique. La Fed étant paralysée par l’inflation la plus élevée de cette génération et par un marché du travail tendu, nous nous attendons à ce que les décideurs politiques hésitent à procéder à des réductions significatives (une réduction pourrait entraîner une hausse durable de l'activité économique), à moins qu'il ne devienne évident qu'une récession est en train de s'installer. Nous pensons obtenir des éclaircissements sur la prochaine décision de taux de la Fed au cours du premier semestre 2024. D'ici là, nous continuons à penser qu'il est prudent de privilégier des actions de meilleure qualité au profil
plus défensif.
Illustration 4 : La Fed doit contribuer à la relance de l’économie

*Cycles de baisse des taux d’au moins 75 points de base qui ne se sont pas inscrits dans un cycle de hausse plus large. Données au 30 septembre 2023, dernières données disponibles au 30 novembre 2023. Source : BEA, Réserve fédérale, FactSet, NBER.
Définitions
Le tableau de bord sur les risques de récession de ClearBridge est un groupe de 12 indicateurs qui analysent la santé de l’économie américaine et la probabilité d’un ralentissement.
Le Conseil de la Réserve fédérale (la Fed) est chargé de définir les politiques des États-Unis visant à promouvoir la croissance économique, le plein emploi, la stabilité des prix et un modèle durable de commerce et de paiements internationaux.
Le Federal Open Market Committee (FOMC) est l'organe de décision du système de la Réserve fédérale chargé de définir une politique visant à promouvoir la croissance économique, le plein emploi, la stabilité des prix et un modèle durable de commerce et de paiements internationaux.
Le produit intérieur brut (PIB) est une statistique économique qui mesure la valeur de marché totale de l’ensemble des produits et services finaux produits par un pays sur une période donnée.
L'indice S&P 500 est un indice non géré composé de 500 actions qui est généralement représentatif des performances des grandes entreprises aux États-Unis.
L'indice des prix des dépenses de consommation personnelle (PCE) mesure les prix payés par les consommateurs pour les biens et services ainsi que les variations de ces prix. Il est considéré comme un indicateur de l'inflation dans l'économie américaine.
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