CONTRIBUTEURS

John L. Bellows, PhD
Lors de la réunion du Federal Open Market Committee (FOMC) du 15 décembre 2021, la Réserve fédérale américaine (la Fed) est allée de l’avant avec son programme de retrait des mesures d’assouplissement extraordinaires qu’elle avait mises en place pendant la pandémie. La Fed a accéléré la réduction des achats d’actifs, en doublant le rythme des achats à 30 milliards de dollars par mois, pour pouvoir les conclure d’ici la mi-mars 2022. Elle a également augmenté ses attentes quant aux nombres de hausses des taux l’année prochaine. Dorénavant, la plupart des membres du Federal Open Market Committee (FOMC) prévoient pouvoir augmenter les taux trois fois l’année prochaine. Selon ces attentes, les hausses devraient commencer en mai ou en juin, mais plusieurs permutations sont possibles, bien sûr. Ces mesures étaient largement attendues. Les cours du marché se sont considérablement ajustés pendant les six dernières semaines. Avant la réunion, le marché avait pris en compte une hausse pratiquement complète lors de la réunion de juin prochain. Le résultat de cette réunion a validé la tarification actuelle du marché, plutôt que de la changer.
Voici le contexte des actions de la Fed. L’inflation a nettement accéléré ces derniers mois. Cette accélération découle des bénéfices disproportionnés dans les secteurs des biens aux prises avec une offre limitée (comme les voitures), et le raffermissement des coûts du logement a aussi contribué. Le progrès du mandat de la Fed en matière d’emploi a été comparativement plus limité. Les deux mois de baisses du taux de chômage laissent entendre une légère réduction des capacités excédentaires par rapport à la période où a eu lieu la précédente réunion de la Fed. Cependant, le marché de l’emploi n’a pas encore atteint le plein emploi, comme le montre la distance encore importante pour atteindre la tendance d’avant la pandémie en nombre d’emplois total (7 millions) ainsi que le ratio emploi-population dans la force de l’âge d’avant la pandémie (plus de 1,5 point de pourcentage).
Il y a sans doute eu des discussions entre responsables de la Fed sur la façon d’équilibrer les deux côtés du mandat – d’un côté, une inflation étonnement forte, de l’autre, une distance encore importante jusqu’au plein emploi –, mais le résultat de la réunion avait été largement anticipé par les commentaires publics avant la réunion, qui était axée sur les risques d’inflation. L’intérêt porté à l’inflation a de nouveau été évident au cours de la conférence de presse qui a suivi la réunion. En fait, le président de la Fed, Jerome Powell, a clairement attribué l’accélération de la réduction des mesures de relance au résultat surprise de l’indice des prix à la consommation (« IPC ») en octobre. Il a déclaré : « Le vendredi suivant, nous avons reçu l’IPC, dont la donnée était très élevée; pour être honnête, c’est à ce moment-là que j’ai décidé que nous devions réfléchir à l’accélération de la réduction des mesures de relance. »
La politique de la Fed semble liée à l’inflation. Il serait intéressant de savoir si la Fed réagit actuellement à l’évolution de l’inflation ou si elle l’anticipe. D’après la faible magnitude des fluctuations des cours sur les marchés des taux d’intérêt, en tout cas par rapport aux ajustements beaucoup plus marqués provoqués par la publication des données sur l’inflation entre les réunions, il semble que la Fed suit les données économiques plutôt qu’elle ne les dirige. Ce n’est peut-être pas totalement le cas – ces dernières semaines, les cours ont aussi réagi à des commentaires de responsables de la Fed – mais il s’agit d’une interprétation plausible qui paraît confirmée par l’évolution récente des cours boursiers. La conclusion serait la même si l’on comparait l’importance de l’inflation inattendue (ces six derniers mois, les prévisions de la Fed en matière d’inflation de l’exercice en cours ont été revues à la hausse de près de 2 points de pourcentage) au changement de la politique de la Fed (seulement trois hausses supplémentaires prévues dans les 12 prochains mois). Le fait qu’une inflation inattendue aussi forte ne débouche que sur une réaction plutôt limitée de la Fed semble montrer que celle-ci n’essaie pas d’anticiper activement les événements.
Lors de l’examen du cadre de l’année dernière, la Fed a adopté une politique consistant à suivre les données de l’inflation (plutôt que de les diriger). Le cycle de resserrement préventif qui a commencé en 2015 était une erreur politique évitable. L’inflation qui était alors attendue ne s’est jamais concrétisée et le resserrement a probablement plutôt retardé des gains supplémentaires sur le marché du travail. La stratégie actuelle de la Fed, qui a été mise en oeuvre l’année dernière, a explicitement été conçue pour éviter de faire la même erreur. Le niveau actuel de l’inflation est probablement bien supérieur à ce que les responsables de la Fed avaient en tête lorsqu’ils ont formulé leur stratégie. Néanmoins, le fait qu’ils n’ont pas essayé de prévenir l’inflation était, jusqu’à un certain point, volontaire. La nouvelle stratégie a moins d’un an et il est probable que la Fed rechigne toujours à préjuger des données inflationnistes.
Certains investisseurs pourraient s’inquiéter de ce que la suppression des mesures de relance par la Fed oblige la politique de la banque centrale à devoir finalement anticiper sur l’évolution de l’inflation. Si cela devait arriver, cela pourrait représenter un défi pour la croissance et les actifs risqués. De la même manière, certains s’inquiètent de voir la stratégie actuelle être renversée : dans le passé, la Fed a rejeté un resserrement préventif, alors pourquoi ne pourrait-elle par l’adopter un jour? Nous soupçonnons que les scénarios qui pourraient déboucher sur ce résultat sont très improbables. Par exemple, les perspectives inflationnistes pourraient fortement se détériorer, assez pour appeler à une vigoureuse réponse de la Fed. Cela pourrait se produire si une mentalité inflationniste devait trop prendre racine, provoquant ainsi des changements dans le comportement des consommateurs ou des producteurs, sans parler des hausses de prix en cours. Il y a très peu de preuves convaincantes que cela se produise. Les attentes inflationnistes fondées sur le marché et celles fondées sur les sondages ne restent que légèrement supérieures aux niveaux d’avant la pandémie. On s’accorde a dire que la plus grande partie de l’inflation actuelle peut être attribuée à la pandémie; il est donc peu probable qu’elle se produise de façon répétée. Un marché de l’emploi indéniablement serré est un autre scénario qui pourrait plausiblement pousser la Fed à renverser sa stratégie et à essayer d’anticiper l’évolution de l’inflation. Même si c’est théoriquement possible, les perspectives à l’égard d’un tel marché de l’emploi semblent assez éloignées pour l’instant. Non seulement plusieurs indicateurs sont encore loin de leur niveau d’avant la pandémie, mais l’expérience de 2018-2019 suggère que les mesures classiques ne capturent pas vraiment la véritable capacité du marché de l’emploi.
Par conséquent, nous ne pouvons qu’en conclure que la Fed réagit aux fluctuations de l’inflation sans essayer de les anticiper. Il est peu probable que cette attitude change beaucoup à court terme. Quelles sont les incidences sur les perspectives? La réaction de la Fed face à de récentes surprises en matière d’inflation nous donne une assez bonne idée de ce qui pourrait se produire si l’inflation devait rester aux niveaux élevés actuels. Dans ce cas, il est probable que la Fed poursuivrait son programme de retrait des mesures de relance et pourrait même accélérer le processus, comme elle l’a fait récemment. Il y aurait cependant des limites, puisque nous soupçonnons qu’elle voudrait toujours suivre l’évolution de l’inflation, sans vouloir l’anticiper. Par conséquent, tout retrait des mesures de relance se fera de façon probablement mesurée, et non abrupte. En outre, les responsables feront aussi particulièrement attention à ne pas nuire involontairement au marché de l’emploi, ce qui pourrait encore limiter tout ajustement destiné à resserrer la politique.
D’un autre côté, que se passerait-il si l’inflation devait reculer par rapport à ses niveaux actuels, et peut-être même décevoir les prévisions au cours des prochains trimestres? Il n’est pas difficile de voir ce qui pourrait mener à ce résultat : le ralentissement de la croissance après des niveaux élevés, le retour de l’offre lorsque les producteurs auront mis la pandémie derrière eux et les pressions désinflationnistes structurelles qui se réaffirment. Dans ce cas, nous soupçonnons que la Fed éviterait de resserrer la politique tant que les cours du marché restent proches des niveaux actuels. La Fed a l’intention de réagir à l’inflation, pas de l’anticiper, et si l’inflation recule d’elle-même, alors les risques de répéter les mêmes erreurs seraient bien trop élevés pour que la banque centrale aille de l’avant.
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