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« Celui qui peut avoir de la patience peut avoir ce qu'il veut. » ~

 

La grande tendance séculaire à la désinflation que le monde développé a connue pendant la majeure partie des 40 dernières années a été brutalement interrompue. Les largesses monétaires et fiscales combinées à la reprise de la demande post-COVID-19 face à une offre très limitée entravaient déjà l'inflation. Le conflit entre l'Ukraine et la Russie n'a fait qu'amplifier le problème. La Réserve fédérale américaine (Fed) a entrepris de faire de l'inflation sa priorité principale en s'engageant à ramener le taux des fonds fédéraux dans la fourchette neutre (définie par son président, Jerome Powell, comme étant de 2 % à 3 %). Sa stratégie, exposée par le vice-président John C. Williams, consiste à ramener l'inflation de base sous les 4 % cette année, 3 % l'année prochaine et 2 % en 2024.

Le marché affiche un franc pessimisme quant aux probabilités d'atteindre ces résultats. Plus précisément, la solidité du marché du travail, des prix du logement et de ceux des produits de base n'a encore donné aucun signe de faiblesse. Mais les marchés ont les yeux tournés vers l'avenir, et les vents favorables à l'inflation, aussi redoutables qu'ils aient été, cèdent la place aux vents contraires qu'affronte la croissance mondiale et américaine. Même si elle maintient son programme de confinement zéro-COVID-19, la Chine a beaucoup de mal à faire redémarrer sa croissance. La guerre en Ukraine continue à peser lourdement sur la croissance européenne. À l'échelle mondiale, les consommateurs sont pénalisés par la forte baisse des revenus réels, mais ce phénomène touche particulièrement les marchés émergents. Aux États-Unis, le pivot agressif de la Fed augmente les risques d'un ralentissement.

Nous sommes enclins à croire que la politique monétaire vise à détruire la demande. En dépit des revers liés aux événements d'Ukraine et de Chine, les graves déséquilibres de l'offre se résorberont lentement mais sûrement. La politique budgétaire se rigidifie. L'offre de logements aux États-Unis est en forte augmentation alors même que les taux hypothécaires ont freiné la demande. Les revenus réels sont malmenés, et les exemples d'Amazon, Walmart et Target suggèrent que les stocks sont en passe d'être entièrement reconstitués alors même que la croissance de la consommation semble au point mort. Tous ces éléments laissent présager une trajectoire nettement plus faible pour l'inflation au fur et à mesure que l'année avance.

Illustration 1 : Ratios d'endettement et de couverture des intérêts pour les crédits de qualité Investment-Grade (IG) et haut rendement (HY)

Source : Bloomberg, FactSet, Goldman Sachs Global Investment Research. Au 31 mars 2022. Les chiffres correspondent aux moyennes mobiles sur 4 trimestres pour tenir compte des facteurs saisonniers ; les zones ombrées indiquent les récessions.

Les marchés du crédit sont assaillis par des craintes de récession rampantes. En dépit de fondamentaux très solides, les probabilités de défaillance à terme implicites du marché dépassent amplement les moyennes historiques, et au moins tout ce que suggère le contexte fondamental favorable actuel. La probabilité implicite de défaillance sur cinq ans pour le crédit de qualité investment-grade s'élève à 10,9 %, tandis qu'elle est passée à 31,7 % pour le crédit haut rendement. Ces chiffres tranchent très nettement avec les taux de défaut actuels sur cinq ans (respectivement 0,1 % et 17,8 %). Bien que les paramètres actuels de la dette, tels que l'effet de levier et la couverture des intérêts (illustration 1), ainsi que la génération de flux de trésorerie disponibles et la santé générale du bilan, semblent indiquer le contraire, les marchés du crédit se préparent à une transition brutale vers des temps plus difficiles.

Une fois de plus, la crainte que le resserrement de la politique de la Fed se poursuive jusqu'à une éventuelle récession économique et pendant celle-ci a incité la plupart des investisseurs à revenu à réduire leurs positions en titres de créance, tandis que même les plus optimistes restent en retrait. La crainte semble avoir remplacé l'optimisme sur tous les marchés du crédit.

Ce sont des périodes comme celle-ci qui ont été les plus favorables à Western Asset. Le respect de notre discipline fondamentale de valeur relative adoptée de longue date nous aide à identifier les opportunités qui apparaissent lorsque l'appréhension et l'inquiétude poussent les valorisations bien au-delà de la juste valeur. Nous pensons que ce type de situation nous guette aujourd'hui. L'aversion au risque atteint un niveau extrême. Le crédit investment-grade subit la plus forte baisse qu'il ait jamais connue, actuellement de -12,04% depuis le début de l'année (au 24 mai 2022), tandis que le marché du haut rendement est en passe d'enregistrer sa deuxième plus mauvaise année en 40 ans d'histoire, 2008 constituant la seule exception. Même si certaines voix pourraient suggérer que la hausse spectaculaire des taux d'intérêt est seule en cause, nous pensons que le mouvement plus récent d'élargissement des spreads a lui aussi beaucoup contribué à la performance décevante du crédit.

Illustration 2 : Des spreads élargis impliquent des taux de défaut cumulés élevés

Source : Bloomberg, Moodys. Au 23 mai 2022.
1 Défauts cumulés implicites sur 5 ans.
2 Défauts cumulés réels sur les 5 dernières années (2017-2021).
3 Défauts cumulés historiques réalisés pour des périodes de 5 ans en moyenne depuis 1970.

En outre, un thème défensif général axé sur le crédit semble résonner sur les marchés du crédit. Les stocks des conseillers en placement à haut rendement n'ont jamais été aussi bas, alors que les fonds communs de placement à haut rendement ont fait face à des sorties de capitaux de 43 milliards de dollars au cours des derniers mois et que les soldes de trésorerie des fonds communs de placement sont amplement supérieurs aux moyennes historiques. Dans une récente enquête de la Bank of America, les gérants de fonds mondiaux signalaient que les liquidités constituaient leur principale surpondération ; le rythme des émissions de titres haut rendement a quant à lui ralenti à un niveau sans précédent depuis des années.

Le marché obligataire baissier, caractérisé à la fois par des taux plus élevés et des spreads plus larges, est toujours aussi décourageant. Cette situation a cependant un avantage : le rétablissement d'une meilleure structure des rendements. Dans une optique de portefeuille à long terme, les obligations produisent un revenu, et elles sont intrinsèquement moins volatiles que les actions (indépendamment de l'année en cours). Pour l'investisseur, l'engagement de la Fed à renouer avec son objectif d'inflation de 2 % est finalement une bonne chose. Seul un environnement où l'inflation reste élevée et en hausse permet aux investisseurs se tenir en retrait sans crainte, sachant que les banques centrales continueront à augmenter les taux courts. Un contexte d'inflation modératrice, même à partir de niveaux élevés, laisse entrevoir la perspective de la fin des hausses des taux courts.

Avant la pandémie - et même pendant la période de la politique de taux zéro de Powell -, les investisseurs recherchaient avant tout les rendements sûrs. Même si cette question semble éloignée des récents soubresauts du marché, il arrivera un moment où elle reviendra à l'avant-plan. Le maintien de spreads attrayants face à des hypothèses de défaut très pessimistes dans un contexte où le prix des obligations d'État dépasse les prévisions d'inflation des banques centrales est légitime. Juguler l'inflation peut prendre du temps, mais la tâche n'a rien d'insurmontable. En effet, des évolutions positives telles que la disparition du COVID-19 ou une baisse d'intensité du conflit Ukraine/Russie pourraient considérablement favoriser cette évolution. Aucune de ces deux hypothèses n'est en vue pour l'instant, mais aucune n'est exclue non plus.

La Fed a lancé sa grande expérience en réponse à une pandémie mondiale. Elle s'efforce à présent d'y mettre fin de manière abrupte. Initialement convaincue que l'inflation serait passagère, la Fed est désormais persuadée que son potentiel de persistance justifie de prendre des risques croissants de récession. Nous pensons qu'à mesure que le taux des fonds fédéraux s'approche des 2 %, davantage de prudence serait de mise au vu du ralentissement de la croissance et de l'inflation, ainsi que de la perspective de conséquences imprévues à prendre en compte. Au final, c'est la trajectoire de l'inflation qui prévaudra. Sur ce point, nous sommes optimistes.



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