La remontée fulgurante qui a suivi les creux du marché baissier de mars a porté de nombreuses personnes à se demander si les investisseurs en actions étaient déconnectés par rapport à ce qu’il se produit réellement dans l’ensemble de l’économie. Comment se fait-il que les marchés boursiers se dirigent vers des sommets records, en dépit de l’anxiété entourant la COVID-19, du taux de chômage à deux chiffres, de la faiblesse des bénéfices des sociétés et du contexte politique américain qui demeure très instable?
Il semble logique de présumer que le rendement du marché boursier devrait aller de pair avec les conditions économiques. Après tout, la croissance économique devrait se traduire en une hausse des bénéfices de sociétés, qui, à son tour, devrait stimuler les gains et soutenir la hausse du cours des actions.
En dépit de ce raisonnement convaincant, l’histoire révèle que la corrélation qu’entretiennent les rendements du marché boursier et les mesures de croissance générale de l’économie (PIB) est faible, et parfois même négative. Permettez-moi de vous faire part de nos réflexions au sujet des raisons pouvant expliquer ce phénomène et de nos perspectives sur la dislocation qui se produit actuellement entre les marchés boursiers et l’économie.
CE QUI SE PASSE SOUS LE CAPOT
Même si Donald Trump affirme que quand le marché va, tout va, le marché boursier n’est pas l’économie. En fait, les marchés boursiers sont généralement représentés par des indices (comme l’indice S&P 500), qui sont composés d’un groupe de sociétés ouvertes très restreint. La plupart des indices sont pondérés en fonction de la capitalisation boursière de manière à ce que les grandes sociétés aient une incidence plus grande sur l’ampleur globale des variations des indices. Il peut être trompeur de s’attarder uniquement aux données sur le rendement des indices, car elles sont influencées par un groupe de sociétés de plus en plus petit.

Dans le graphique ci-dessus, observez l’influence que peuvent exercer les actions de grande société sur l’indice dans son ensemble. Depuis le début de l’année, l’indice S&P 500 a enregistré un rendement positif, mais seulement en raison des solides résultats de certaines grandes sociétés de l’indice. Les « 495 autres actions » ont été loin de se comporter aussi bien que le suggère l’indice. Certaines sociétés ont profité du recul engendré par la pandémie de COVID-19, mais ce n’est pas le cas de la majorité.
EN AVANT TOUT
Les marchés boursiers sont tournés vers l’avenir; ils tentent de refléter l’économie future plutôt que celle d’aujourd’hui. La récente reprise des marchés boursiers est en partie attribuable à l’injection massive de liquidités par les banques centrales, aux importants programmes de soutien des gouvernements et au constat selon lequel les pandémies sont temporaires, et non pas permanentes. Ces « nouveaux » fonds doivent aller quelque part, et la plupart se sont retrouvés dans des actions, en particulier dans des actions de sociétés technologiques à grande capitalisation. Il convient d’ajouter que la concentration extrême sur la mise au point d’un vaccin et sur de nouveaux traitements pharmacologiques pour traiter la COVID-19 est également prise en compte par les investisseurs.
La dislocation entre l’économie et les marchés boursiers n’est pas réellement inhabituelle étant donné la nature prévisionnelle des marchés. Ce qui est exceptionnel, c’est l’ampleur et la vitesse de la reprise du marché boursier; mais avec toutes les mesures de relance qui ont été mises en œuvre, il ne faudrait pas s’en étonner.
De nombreuses personnes considèrent que les marges bénéficiaires ou la croissance des bénéfices (baisses) sont les principales dislocations, mais on s’attendait à ce que les marges reculent. Ce sont le creux et l’orientation future des marges qui sont essentiels. Les marges bénéficiaires vont remonter de ces niveaux très faibles. La grande question est la suivante : « les valorisations ont-elles pleinement intégré la remontée » ou, autrement dit, « les ratios cours/bénéfices ont-ils rebondi trop vite et trop loin »?
Par le passé, les ratios cours/bénéfices se sont souvent envolés en prévision d’une reprise des bénéfices. Étant donné l’ampleur et la vitesse de la remontée, en particulier au cours des derniers mois, nous faisons preuve de prudence et n’étoffons pas activement nos positions en actions – nous pourrions même réduire notre exposition à certains endroits.

QU’EST-CE QUI NOUS ATTEND ENSUITE?
Nous croyons qu’au bout du compte, l’économie rattrapera le marché boursier. Entre temps, la confiance des investisseurs est soutenue par d’importants mécanismes de soutien monétaire et budgétaire. Même si nous constatons des signes de dynamisme dans l’économie mondiale, nous nous attendons à voir les effets persistants de la profonde récession qui a suivi la crise de la COVID-19.
L’incertitude politique est également un facteur qui prend de l’ampleur à l’approche de l’élection présidentielle américaine. Cet événement pourrait potentiellement miner de plus en plus la confiance et la planification des entreprises au cours des prochains trimestres.
Nous prévoyons que la reprise économique pour certains secteurs (p. ex. le voyage et l’hébergement) soit modeste et nous voyons que les risques de reprise à la baisse deviennent prépondérants, en raison en partie de la menace posée par une deuxième vague d’infection.
Pour cette raison, nous adoptons une approche relativement prudente en ce qui concerne la croissance économique à court terme. Nous restons optimistes quant aux actions à long terme, mais nous avons atténué le niveau de notre conviction, étant donné l’importance des gains depuis les creux de mars.
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